Hiroshi Sakurai – novembre 2023

L’annonce du premier prix et la cérémonie de remise des prix du cinquième concours national Yamada Nishiki se tiendront à l'hôtel Imperial de Tokyo le 12 janvier 2024.

Ce concours a été lancé pour encourager les agriculteurs qui cultivent du riz Yamada Nishiki à rêver. Le Yamada Nishiki est souvent considéré comme le « roi du riz à saké » ou le « meilleur riz à saké » mais dans un environnement agricole où la logique de la communauté locale prévaut, je pense que les agriculteurs indépendants n'ont pas été suffisamment valorisés. L'idée est d'organiser un concours pour ces agriculteurs, en particulier ceux qui sont suffisamment forts et motivés, et d'acheter 60 hyo (balle de riz, environ 60kg par balle) de Yamada Nishiki à l'agriculteur qui remportera la première place au prix de 500 000 yens par balle, soit un total de 30 millions de yens.

Comme vous l’imaginez, l'idée est née de la vente aux enchères annuelle de thon à l’occasion du nouvel an. Cette vente aux enchères, où le premier prix dépasse les cent millions de yens, est incroyable, de mon point de vue. Et je pense que c’est ce sentiment dont nous avons besoin pour la production de riz !  Après tout, même si nous nous efforçons tous de faire bonne figure et de dire qu'il faut protéger l'agriculture japonaise, nous ne pourrons pas sortir ainsi ce secteur de la situation de blocage dans laquelle il se trouve aujourd'hui. Dans le même temps, la recherche d’une certaine régularité et de l'efficacité maximale menée par les organisations coopératives agricoles bureaucratisées progresse au sein d'une culture égalitaire qui encourage l'homogénéisation et qui imprègne la société rurale d'aujourd'hui. Dans cet environnement, les agriculteurs qui travaillent dur pour cultiver un bon Yamada Nishiki ne sont pas récompensés, et la réalité est que les choses ne changeront pas quel que soit le travail fourni. Le concours est né du désir de faire disparaître ce sentiment commun indescriptible et vague de désespoir.

C'est dans cet optique que j'ai lancé le concours, comme d'habitude, sans prendre en compte l’avis des soi-disantes « personnes importantes » de la société agricole japonaise. Mais grâce à la coopération de M. Hirokane et d'autres agriculteurs motivés à travers le pays, nous avons pu continuer jusque-là.

Dans le cadre de ce concours, deux sujets ont été soulevées. Le premier est que les critères d'évaluation du concours ont changé, passant de la norme du classement précédent, qui était basée sur les « conditions généralement acceptées pour un bon Yamada Nishiki », aux propres normes d'Asahi Shuzo. Il ne s’agit en aucun cas de favoriser des intérêts propres. Il s'agit d'un changement significatif qui remet en question les critères de sélection conventionnels.

Pendant de nombreuses années, l’apparence et la taille du cœur du riz (shinpaku) ont été considérées comme importantes dans les critères de sélection de la qualité du Yamada Nishiki. Le concours s'est ouvertement inscrit en faux contre ces critères. L'idée était que « le Yamada Nishiki n'a pas besoin d’un cœur du riz trop gros ».

Le Yamada Nishiki est un riz à saké développé à l'ère Taisho à la station d’expérimentation agricole de la préfecture de Hyogo à partir d’un croisement des variétés Tankan Wataribune et Yamadaho. Au début, le Yamada Nishiki était utilisé dans les brasseries de la région de Nada parce qu'il produisait un bon koji sans avoir besoin de trop polissage. Par conséquent, le Yamada Nishiki a d'abord été un riz permettant de réduire le coût de production du saké ordinaire.

Toutefois, un premier boom du saké Ginjo a eu lieu à l'époque de la bulle économique dans les années 80. A l’apogée de ce boom, la médaille du concours national des nouveaux sakés a connu un nouvel intérêt. Que ce soit vrai ou non, à cette époque, gagner la médaille d'or signifiait que le téléphone de la brasserie n'arrêtait pas de sonner et que le saké de cette brasserie était vendu dès le lendemain.

C'est dans ce contexte que l'on a redécouvert l'excellence du Yamada Nishiki. Si vous utilisez du Yamada Nishiki, vous pouvez faire un bon saké Daiginjo. Et l’idée s’est imposée que si on ne l'utilisait pas, on ne pouvait pas gagner la médaille d'or. En fait, aujourd'hui encore, plus de 80 % des sakés qui remportent des médailles d'or sont fabriqués à partir de Yamada Nishiki. En d'autres termes, le Yamada Nishiki, qui était apprécié parce qu'il pouvait être utilisé pour fabriquer du saké ordinaire sans qu'il soit nécessaire de polir autant le riz, était reconnu comme une matière première pour le saké Ginjo.

Toutefois, le caractère du saké Ginjo a progressivement changé. Au début, on ajoutait de l’alcool dans la plupart des sakés (comme expliqué dans l'édition précédente de la lettre d’un Kuramoto). Le taux de polissage du riz était généralement de 50 %. Il était courant de trouver les sakés Ginjo vendu dans un coffret en bois à un prix de 5 000 yens. Mais après l'éclatement de la bulle économique (au début des années 90), le Junmai fabriqué uniquement à partir de riz, est devenu courant. Et pour obtenir un Junmai Daiginjo dès plus élégant, un riz hautement poli est devenu indispensable.

 

Or si le taux de polissage dépasse 50 %, comme dans le cas du Dassai 23, le cœur du riz du Yamada Nishiki, plus grand qu'il n'est nécessaire, devient un obstacle. Lorsque le riz est poli, si on atteint le cœur du riz, il se brise et devient du riz concassé. En d'autres termes, plus le riz est poli pour produire un bon saké, plus on obtient du son de riz. C’est-à-dire, le grand cœur du riz, l'un des principaux critères de classement de Yamada Nishiki, est un obstacle lorsqu'on produit le Junmai Daiginjo idéal de Dassai.

C'est pourquoi nous avons revu les critères d'évaluation du concours. La qualité du grain et l’homogénéité de taille est toujours exigée, mais les gros grains ne sont pas retenus si de fines fissures du grain sont visibles au microscope. Le cœur du riz (shinpaku) est nécessaire, mais il doit être petit, au milieu du grain. Telle est la norme.

Cependant, s'opposer à la méthode conventionnelle de jugement selon ces critères de classement, c'est se rebeller contre le secteur agricole, avec au sommet le MAFF (Ministère de l’Agriculture, des Forêts et de la Pêche), et pour ainsi dire, certaines personnes étaient donc inquiètes. Toutefois, le riz à saké est destiné à la fabrication d'un bon saké, de sorte que lorsqu'on fabrique un excellent Junmai Daiginjo, il n'est pas bon d'utiliser un riz contenant des éléments négatifs, même s'il est considéré comme excellent selon les normes précédentes. Les normes doivent évoluer avec le monde.

Nous avons pris cette mesure parce que nous pensions que seul Dassai pouvaient le faire.

L'autre sujet est le développement de Beyond the Beyond (Au-delà d’au-delà). Comme prévu, lorsque vous brassez du riz qui coûte 30 millions de yens, la valorisation de ce saké est plus complexe. Cela m'a fait réfléchir au fait que, comparé au vin, il n'existe pas de saké à prix très élevé. Bien sûr, il est possible de fixer un prix aussi élevé que souhaité, mais il faut ce prix ait un sens sur le marché.

Aussi nous avons décidé que ce soit la demande du marché international qui fasse de ce saké fabriqué à partir d’un riz extrêmement cher, un saké à prix élevé qui rivaliserait avec le vin.

Aussi nous avons présenté ce saké fabriqué à partir de ce riz extrêmement cher, comme un saké à prix élevé qui rivaliserait avec le vin. Grâce à votre soutien, la première cuvée de Dassai fabriquée à partir du riz gagnant a atteint 840 000 yens (pour 720 ml) lors de la vente aux enchères de Sotheby's à Hong Kong. Le saké de la troisième année a atteint 1,15 million de yens chez Sotheby's également, à New York. Cette année, nous proposons également une bouteille de 2,3 litres, que nous appelons Magnum, et dont le prix dépasserait les 5 millions de yens dans les restaurants locaux. Nous avons déjà reçu des précommandes pour neuf bouteilles et nous attendons qu'elles soient expédiées. Ces précommandes viennent du marché international, mais il devrait rester quelques bouteilles au Japon.

Je pense qu'il s'agit d‘une réussite importante pour les producteurs de Yamada Nishiki qui produisent un riz extraordinaire. Et oui, je vous ai bien dit la dernière fois que même s'il s'agit de son de riz, l'alcool de brasserie fabriqué avec ce riz est considéré comme « indispensable » pour gagner des médailles d'or dans certaines brasseries de saké.

 

Yamada Nishiki ! Banzai !