Comme nous l'avons déjà annoncé sur notre site web, deux nouveaux produits ont rejoint la gamme Dassai. Voici le contexte et les réflexions qui ont présidé à leur élaboration.
À propos du "Dassai Bisui "
Il y a une chose à laquelle je pense toujours lorsque je bois du saké, pas seulement du Dassai, mais n'importe quel saké que je trouve bon : "C'est bon, mais la teneur en alcool ne pourrait-elle pas être un peu plus faible? "
Dassai est généralement mis en bouteille après avoir ajouté de l'eau pour que la teneur en alcool soit à son niveau optimal, cela permet d’avoir une qualité, un équilibre dans le saké. Mais j’ai aussi dans l’idée qu’un grand saké doit pouvoir se déguster lentement. Si l'on vous propose une coupe de champagne, vous remarquerez d'autant plus la forte teneur en alcool du saké.
Dans ce cas, on pourrait penser que la solution est simple : il suffit d'ajouter de l'eau au saké lors de la mise en bouteille. Cependant, cela le rendrait trop aqueux et ne permettrait pas de faire sortir le meilleur en termers d’arômes et de saveurs.
C'est pourquoi la création d'un "Dassai à faible teneur en alcool" est un thème récurrent pour nous depuis plus de 20 ans. Notre directeur de production actuel - M. Nishida - travaille avec moi sur ce projet depuis son arrivée dans l'entreprise. Or, nous n'avons jamais été en mesure de produire quelque chose qui nous plaise.
Pourtant, l'équipe dirigée par M. Nagao a trouvé une solution. Sa solution consiste à contrôler la température de la cuve de fermentation ainsi que son alimentation en eau au tout début du stade de fermentation.
En contrôlant ces facteurs plus délicatement, encore plus que le "Dassai Beyond", et avec une période de fermentation d'environ 35 jours, la teneur en alcool ne dépasse pas 11 % - même à la fin. Après le pressage, le saké est mis en bouteille sans ajout d'eau.
Le taux de polissage du riz est de 21%. Le riz est poli de 2% de plus que le niveau de polissage du Dassai 23, et il s'agit bien sûr de riz Yamada Nishiki. Ces caractéristiques de production nous ont permis de surmonter les caractéristiques des boissons peu alcolisées, souvent associées à des cocktails type jus de fruits.
Ce processus a abouti à la création du Dassai Bisui, dont la teneur en alcool n'est que de 10 % mais qui contient des arômes dignes d'un grand Junmai Daiginjo. Le mot "Bisui" signifie "Belle Ivresse". Pour nous, ce saké est un défi relevé, un défi nommé "la nouvelle ère du saké".
À propos de "Dassai Mirai - vers l'avenir avec les agriculteurs".
Quelle que soit l’expérience qu’a un agriculteur à cultiver le Yamada Nishiki, il est inévitable qu'environ 10 % du riz récolté soit considéré comme "impropre à la fabrication du saké" (togai en japonais, ce qui signifie qu'il ne peut être classé).
Même si un producteur de saké fabriquait du saké avec ce riz, le saké n'obtiendrait pas une appellation telle que Junmai ou Honjozo, de sorte que la plupart des producteurs de saké n'achètent pas ce riz aux agriculteurs. Ces derniers sont donc obligés de s’en défaire comme déchet, ce qui un préjudice majeur pour leur activité en tant qu’agriculteur.
Cependant, le riz lui-même est de variété Yamada Nishiki, les grains ont quand même une composition supérieure aux autres. Pour aider les agriculteurs et l'environnement, Asahi Shuzo a depuis longtemps acheté ce riz et l'a utilisé pour fabriquer le "Dassai Togai" et le "Dassai Amazake", en l'étiquetant clairement comme "fabriqué à partir de riz Yamada Nishiki inadapté".
Vous connaissez tous la qualité de notre Dassai Amazake, et nous utilisons du riz poli à 30% pour notre Dassai Togai, afin pour qu'il ne soit pas trop éloigné de la gamme Dassai : nous sommes fier de la qualité de ce saké. En conséquence, le coût était à peu près le même que celui d'un saké Dassai classique.
Au départ, nous avons été impressionnés par la qualité de ce saké, même si nous l'avons fait avec un riz inadapté, et nous avons donc décidé de le sortir à un prix légèrement inférieur. Mais le marché ne l'a pris que comme "un Dassai bon marché", et n'a finalement pas prêté attention aux raisons pour lesquelles nous utilisions ce riz.
Enfin, ce « Dassai Togai » sera finalement devenu un saké qui n'était acheté que par des clients qui voulaient faire une bonne affaire, par des distributeurs et des restaurants qui n'y voyaient qu'une valeur de profit.
Le Yamada Nishiki est né de la terre, et nous voulons tous en faire un délicieux saké pour que chacun puisse en profiter. Mais c'est difficile lorsque les gens ne voient que la valeur d’un produit dans le fait que son prix est bon marché. C'est pourquoi nous avions décidé d’utiliser ce riz pour produire un autre type de saké, un autre type de Dassai, un saké qui satisferait ceux qui en comprennent le sens, et non ceux qui n'apprécient que les bonnes affaires.
À propos, il y a deux facteurs qui font qu'un riz est considéré comme "impropre à la fabrication du saké" : d’abord, "les differences dans la taille et la forme des grains" et "la faible apparence du shinpaku (le cœur trouble du grain de riz)".
Or un jour, au cours d'une discussion interne, il a été mentionné qu'il était impossible de polir le riz en dessous d'un certain ratio de polissage, car le shinpaku de Yamada Nishiki serait détruit au cours du procédé.
Ce shinpaku est bien sûr à la fois la beauté et la faiblesse pour le riz Yamada Nishiki : même si vous ne sélectionniez que les meilleurs 30% d'une récolte au stade de riz brun non raffiné et que vous les polissiez, vous ne pouvez les polir qu'à 15 ou 16% au maximum. Si vous le polissez plus que ça, le grain se casse et se désagrège.
Soudain, j'ai eu une idée.
Comme le riz inadapté et déclassé n'a pas de shinpaku, nous pourrions le polir à l'extrême ; les grains seraient alors de taille uniforme et conviendraient à la fabrication du saké. En dessous de 6% du grain, la machine à polir le riz est réglée pour jeter les grains en tant que déchet, qui tombent sous forme de son de riz. Alors pourquoi ne pas essayer de polir ce riz déclassé jusqu'à 8% ?
En fait, le riz poli à 8% était magnifique, mais nous nous demandions quand même s'il pouvait faire un bon riz à koji. Et en réalilté, le riz koji à 8% était un peu faible en termes de saccharification (c'est-à-dire en quantité de sucre convertie), mais il s'est avéré être assez bon. De plus, comme le riz servant à alimenter le ferment était également à 8%, ce koji faisait très bien l’affaire.
Le résultat est un saké à faible taux de glucose, ce qui peut sembler peu attrayant, mais le taux de polissage élevé compense et lui confère un charme unique, beau à tous points de vue. Il est l'incarnation du désir de Dassai de se tourner vers l'avenir tout en soutenant les riziculteurs de Yamada Nishiki.
Pourquoi est-il probable qu'ils ne se vendent pas?
En fait, les deux sakés coûtent plus de 10 000 yens (75€) pour une bouteille de 720 ml. Dassai Bisui a un taux de polissage de 21%, et Dassai Mirai a un taux de 8%. Ils ne seront jamais bon marché.
Lorsque nous lançons un produit comme ceux-ci, certains de nos clients nous tombent souvent dessus, se demandant si nous allons un jour produire des sakés abordables. Bien que nous puissions comprendre ce sentiment, nous pensons qu'il est représentatif des problèmes actuels de l'économie japonaise, qui recherche toujours un prix trop bas et souffre de la faible croissance à l’échelle mondiale.
Bien sûr, un juste prix est important, mais les prix bas ne permettent pas d'augmenter les salaires pour le dur labeur requis et elle ne crée rien de nouveau.
Je me souviens vaguement qu'Elon Musk, de Tesla, a parlé des voitures électriques à un public sceptique il y a environs dix ans. Je crois qu'il a dit quelque chose comme :
"Tesla est sur le point de lancer une voiture de sport électrique à 300 000 dollars. Dans trois ans, nous aurons une berline de luxe à quatre portes pour moins de 100 000 dollars. Et dans sept ans, nous aurons une berline de masse de l'ordre de 30 000 dollars qui rendra les voitures électriques accessibles à tous."
Si nous sortons ces deux produits sous la forme de produits à prix élevés, c'est une manière pour nous de contempler, de réfléchir sur cette manière typiquement japonaise dont je parlais plus tôt.
Ainsi, pour l'instant, nous ne vendrons ces produits qu'à notre magasin de Ginza et à notre brasserie. Si vous avez des questions, n'hésitez pas à nous contacter.
Hiroshi SAKURAI - Chairman of Asahi Shuzo